En Suisse, les friches urbaines, ferroviaires en particulier, figurent parmi les rares zones urbaines, en général bien centrées, qui offrent encore de belles opportunités d’expérimentation en matière de développement urbain. Des coopératives d’habitation se lancent. Sortes de tiers-lieux en attente de nouvelles affectations, les friches ferroviaires pourraient être le terrain de rencontres privilégiées entre les projets immobiliers des CFF et des habitants du quartier environnant. A Genève, un trio composé de la coopérative de logement pour personnes en formation La Cigüe, de la coopérative mixte d’activité et d’habitation participative L’Habrik et de l’atelier d’architecture Face à Face montre l’exemple.
Visualisations: Atelier d’architecture Face à Face
Le projet se réfère à l’esprit de la ville événementielle et évolutive héritée des utopies urbaines des années 60 pour inscrire un habitat itinérant, flexible et écologique en symbiose avec des lieux d’activités, dans le contexte actuel des développements urbains.
Habitat modulaire et itinérant
La dernière étape d’une réflexion menée durant plusieurs années s’est concrétisée dans le projet «Habitat modulaire, un potentiel à conquérir». Ce projet a été conçu pour le concours Label_Co, concours organisé par le Groupement des coopératives d’habitation genevoises à l’occasion des vingt ans de l’association. Inscrit dans la catégorie «Utopie», le projet est à la fois lauréat du jury Jurx «experts» et du jury «Génération Z». Il se réfère à l’esprit de la ville événementielle et évolutive héritée des utopies urbaines des années 60 pour inscrire un habitat itinérant, flexible et écologique en symbiose avec des lieux d’activités, dans le contexte actuel des développements urbains.
L’habitat modulaire imaginé par le trio avec des modules en bois est conçu comme lieu d’expérimentation de développement urbain, dans des lieux en transition que sont les friches ferroviaires en Suisse. Il doit permettre l’émergence de nouvelles manières d’habiter, évolutives et plus ou moins itinérantes d’un quartier à un autre, d’une ville à une autre. Et offrir une adaptabilité très flexible entre habitat et activités d’une zone d’affectation grâce à la souplesse de composition qu’offrent les systèmes de constructions modulaires. «Nous voulions montrer que l’on pouvait imaginer un projet d’architecture pour du logement de construction modulaire en bois ayant une qualité au moins égale en terme d’espace et de matérialité à celles de constructions pérennes» souligne Aline Juon, responsable des projets de construction de La Cigüe.
Des modules en bois
Pour la conception des modules, les architectes de Face à face ont opté pour le bois, au détriment des containers en acier offrant une moins bonne habitabilité, et se sont tournées vers des entreprises de construction bois, dont Renggli, pour aboutir finalement à la conception d’un module de base de 3 m de largeur et de longueur variable. Les éléments en bois seraient donc fabriqués en usine, avant d’être transportés et assemblés sur site. La réflexion portait moins sur les finitions des modules que sur leur implantation groupée dans une friche urbaine, soit comme habitat ou lieu d’activités. Des premiers contacts avaient été pris avec les CFF dès 2016 à propos d’une implantation potentielle sur le terrain de Montbrillant à Genève. Séduits par l’idée, les CFF ont proposé d’autres terrains à explorer à Lausanne, à côté de la Manufacture, et à Vevey. L’étude d’implantation comprenait notamment l’estimation des coûts de construction et de déplacement éventuel selon le nombre variable des étages du bâtiment R+3 et R+4.
Habitat modulaire vs gentrification
Les droits de superficie demandé par les CFF pour des terrains qui appartiennent en fait à la Confédération, donc au bon peuple, constituent toutefois un obstacle pour le moment insurmontable à la réalisation d’un projet d’habitat modulaire tel qu’imaginé par les coopératives. Il n’empêche que leur vision utopique pourrait très bien s’accommoder d’un projet simultané, dont la rentabilité même pourrait servir de garant financier à la part expérimentale du projet, dans une sorte de mixité de plan financier. D’autant plus que les CFF sont tout de même tenus d’arrondir un tantinet leurs ambitions de rentabilité par des projets un brin plus sociaux. La construction d’habitat modulaire permettrait alors de valoriser temporairement ces friches urbaines, d’expérimenter de nouvelles formes d’habitat en symbiose avec des lieux d’activités et d’artisanat, et donc de repenser le territoire, notamment du point de vue des utopies de relations sociales qui peuvent s’y déployer, hors hégémonie capitaliste, comme une forme de résistance citoyenne où les habitants se réapproprient l’espace public que délimitent des constructions modulaire plus ou moins temporaires.
Nous voulions montrer que l’on pouvait imaginer un projet d’architecture pour du logement de construction modulaire en bois ayant une qualité au moins égale en terme d’espace et de matérialité à celles de constructions pérennes.
Aline Juon, Responsable des projets de construction de La Cigüe
Liens utiles
Coopérative de logement pour personnes en formation La Cigüe: https://cigue.ch
Coopérative mixte d’activité et d’habitation participative L’Habrik: https://lhabrik.ch
Atelier d’architecture Face à face: https://faceaface.ch
Images: Atelier d’architecture Face à Face
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