Les habitations de la Genter Strasse à Munich donnent envie aujourd’hui encore de composer son propre habitat au sein d’une trame modulaire.

(1) Vue depuis le jardin juste après la finition. Image: Klaus Kinold, Munich (2) Façade avec les entrées. Image: Klaus Kinold (3/4) Façade avec les entrées et les panneaux de façade colorés. Etat actuel. Images: Thomas Reisser, www.pixelrakete.de / A+T Research Group

A la fin des années 60, Munich baignait dans une aura d’optimisme. Les préparatifs pour les Jeux Olympiques de 1972 battaient leur plein, la ville s’agrandissait frénétiquement. Les nouveaux quartiers urbains construits en peu de temps, surtout en périphérie, ont donné un nouveau visage à la ville. Otto Steidle (1943-2004), alors jeune architecte, venait de construire ses premières maisons dans le nord de Munich lorsque, en 1971, ses bâtiments résidentiels de la Genter Strasse ont littéralement propulsé sa carrière à l’échelle nationale. Ralph et Doris Thut ont également participé au projet pionnier de Schwabing. Ensemble, ils ont explosé les conceptions courantes de la maison et de l’habitat en créant de l’habitat intégré expérimental: des plans d’étage avec des espaces ouverts plutôt que compartimentés, propres à des usages multiples plutôt qu’étroitement déterminés; bref, modulables et évolutifs.

Habiter dans des modules industriels

La conception architecturale à elle seule rend les intentions des architectes claires et l’idée sous-jacente d’une forme d’habitat flexible crédible : au lieu d’une stratification conventionnelle pierre sur pierre, la structure portante de la surface habitable a été préfabriquée en tant que système de construction modulaire et industrielle. Sur le chantier, huit rangées avec jusqu’à quatre piliers consoles de trois étages chacun ont été plantés dans des fondations de réception en béton armé pour pilier console. Poutres et poutrelles s’insèrent entre les rangées sur plusieurs niveaux et portent dalles et plafonds modulaires. L’impressionnante structure en béton armé ne prévoyait pas des pièces et des terrasses partout, l’idée étant que les espaces habitables puissent l’occuper petit à petit.

L’ossature porteuse et son potentiel de création aléatoire d’espaces, permettait de créer des pièces ouvertes aux sensations spatiales généreuses sur des étages décalés. Ce qui ressemble de l’extérieur à un bâtiment industriel à vocation technique est divisé à l’intérieur en sept segments, comme des maisons mitoyennes, pour y vivre et y travailler. Otto Steidle a toutefois toujours insisté sur le fait qu’il ne s’agissait pas de maisons mitoyennes: ce qui comptait pour lui n’était pas la répétition, mais la variation des règles dans une structure spatiale donnée. La façade exprime parfaitement sa pensée. Strictement tramée et ludiquement colorée à la fois, elle offre des recoins d’intimité à l’abri des panneaux jaunes et verts. Mais elle s’ouvre généreusement sur le jardin et les terrasses avec de grandes surfaces vitrées. L’extérieur et l’intérieur sont étroitement imbriqués et créent une grande variété de zones de transition.

Humanisation de la construction industrielle

La construction modulaire de la Genter Strasse n’est pas une fin en soi, mais un moyen, et la partie inachevée de celle-ci est programmatique. Elle devait encourager les habitants à s’approprier structurellement le bâtiment et donc à vivre avec lui. Otto Steidle habitait lui-même l’un des six appartements en copropriété, avec son bureau à juste côté. Avec le temps, il ne restera que le bureau d’architecture, qui s’est étendu pièce après pièce dans la maison, par des rajouts et des modifications dans la construction, remplissant de la sorte progressivement l’ossature de l’immeuble. Le lotissement est aujourd’hui classé monument historique. Son évolutivité est également protégée. Steidle a démontré la capacité d’évolution de l’idée originale sur plusieurs années avec trois autres phases de construction dans le voisinage immédiat. L’idée du jardin en tant qu’écrin de verdure est restée inchangée. Les maisons y sont implantées entre les chemins et les arbres, et sont appréciées comme des organismes vivants, robustes et dotés de gènes industriels.

Façade donnant sur le jardin, avec plusieurs niveaux d’habitation, juste après la fin du chantier en 1972.

Image: Klaus Kinold, München

Otto Steidle Genterstrasse Rohbau

Chantier de la Genter Strasse, Munich.

Image: Archiv Steidle + Partner, München

Otto Steidle Genterstrasse Lageplan

Plan de situation des trois tranches de travaux.

Image: Archiv Steidle + Partner, München

Otto Steidle Genterstrasse Betonstützen

Structure porteuse extérieure.

Image: a+t research group ©

Otto Steidle Genterstrasse Querschnitte

Plans de coupe avec les accès de niveaux partagés et les étages d’habitation décalés.

Plans: ARCHIV STEIDLE + PARTNER, MÜNCHEN

Otto Steidle, Genterstr Innenaufnahme

Salon avec accès à la terrasse.

Image: Klaus Kinold, München

Otto Steidle Genterstr Raumkontinuum Innenraum

Espaces polyvalents au sein d’une unité d’habitation.

Image: Klaus Kinold, München

Plus d’informations

L’auteure

Lucia Gratz est architecte indépendante et journaliste libre à Zurich. Elle mène des recherches au sein du groupe de travail « Système & Série » de ICOMOS Suisse sur les constructions modulaires suisses du modernisme d’après-guerre.
www.system-serie.ch

Bibliographie

Conrads, Ullrich; Sack, Manfred (Hrg.), REISSBRETT 3. Otto Steidle. Braunschweig, Wiesbaden 1985
Kossak, Florian (Hrg.), Otto Steidle. Bewohnbare Bauten. Structures for Living. Zürich 1994

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